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PrÉSentation

  • : Moul Boul expérience
  • : Déambulations, observations et divagations d'un jeune journaliste français à Montréal.
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25 mai 2007 5 25 /05 /mai /2007 04:00

Où l’on apprend que les compagnies aériennes aux noms obscurs ne sont pas, on s’en serait douté, un gage de fiabilité, ce qui pose problème à 10.000 mètres d’altitude, que malgré quelques défauts dans le calibrage des alliances elles sont solidement accrochées aux annulaires respectifs des époux Dersoir et que la grève n’est pas, loin s’en faut, une tradition québécoise.

 

Après quatre mois passés à affronter les caprices du mercure montréalais, la personnalité douteuse de mes colocatrices dont l’ouverture d’esprit s’arrête aux frontières du Québec, les Simpson doublé en joual (en québécois version têtes à claque), les chutes du Niagara et les singles de Céline Dion, une coupure hexagonale, aussi brève fût-elle ne pouvait que me faire le plus grand bien. J’étais en train de songer, rêveur, à mon retour en fils prodigue dans ma famille et parmi mes amis, en faisant la queue au comptoir d’enregistrement de Zoom Airlines, (véridique) dont l’un des avions devait théoriquement m’emmener à bon port. Une fois le billet en main et les bagages perdus de vue, Jocelyne, ma triste vis-à-vis, m’informe que je dois me présenter à la porte B 59 de l’aéroport Trudeau afin de procéder à l’embarquement. Jusque là donc, tout va bien, et je me félicite d’avoir pu obtenir un aller-retour des plus concurrentiels sur cette compagnie dont la confidentialité ne semblait rien devoir sacrifier à l’efficacité et au service.

Peut-être aurait-il fallu s’appesantir un brin plus sur la signification de ce B 59 à l’apparence anodine. Après le passage d’usage par les portiques de sécurité qui permettent de confirmer que si un terroriste ne risque pas de pouvoir détourner un avion avec une ceinture à boucle métallique, il est aisé de transporter quatre brique de C4 dans ses chaussettes, je pars en quête de la fameuse porte, celle qui ouvre le chemin de l’Europe. Commence alors le voyage initiatique dans le dédale des couloirs de l’aéroport de Montréal, avec pour seul compas les boutiques de Duty Free qui se succèdent. Je vous confirme donc qu’il existe bel et bien un axiome qui veut que moins cher tu payes ton billet, plus loin tu vas chercher ton avion. Il n’y a pas de petites économies.

Visiblement, certains ont du avoir des rabais encore plus intéressants, puisque au terme de 20 minutes de marche, je me rend compte que la porte B 59 se situe juste avant la B 60 et la B 61, débouchant sur le cul de sac du terminal.

L’heure qui reste avant le décollage est minutieusement meublée par l’absorption d’une bière rousse hors de prix, servie par un barman patibulaire, qui vu l’éloignement de l’endroit ne s’encombre pas de politesses pour rappeler au voyageur assoiffé que le service n’est pas inclus dans le prix.

Mais c’est véritablement dans l’avion que les choses se compliquent. Alors que le Boeing roule sur le tarmac vers l’entame de la piste, une hôtesse de l’air me demande de relever le dossier de mon siège. Je ne me souviens pas de l’avoir baissé, mais je m’exécute sans rechigner. L’avion se positionne en vue du décollage, le pilote pousse les réacteurs à pleine puissance, debout sur les freins et lâche, d’un coup, d’un seul, la purée. Immédiatement, ma colonne se retrouve incrustée dans le dossier qui ne demande pas plus pour s’effondrer sur les genoux de mon voisin de derrière. Ambiance !

Passée cette première émotion j’entreprend de sympathiser avec mon voisin de droite qui très vite mis en confiance, me propose de m’offrir « quelque chose de fort pour bien dormir ». Nous voici donc partis pour une tournée de Vodka pomme et de Gin Fizz. Il y en aura trois. Bien entendu l’alcool ayant l’effet exactement opposé à celui escompté, je n’ai pas réussi à fermer l’œil du voyage. Ce qui m’a permis d’assister à une scène des moins confortables, d’autant plus lorsque la seule chose qui vous sépare d’une mort certaine, consiste en une fine enveloppe de métal et de plastique.

A peu près trois heures après le décollage, alors que l’avion est plongé dans une pénombre nocturne, un voyageur insomniaque décide d’utiliser son éclairage de plafonnier. Légitime attente. D’un geste sûr et déterminé, Jean-Louis (les noms ont été modifiés pour respecter la vie privée du fautif) appuie donc sur l’interrupteur sensé lui faire voir la lumière. En vertu d’un enchaînement de dysfonctionnement dont le détail m’échappe (et à lui aussi par la même occasion), la seule réponse que daigne lui donner le plafonnier de l’avion est une gerbe d’étincelle des moins avenantes. La notion de « Feedback » (spéciale dédicace à tous les communicants qui jettent un œil sur ce blog entre une charte de langage et une stratégie de marque) semble étrangère à Jean-Louis puisqu’il s’acharne sur l’interrupteur qui poursuit son dangereux grésillement et menace de mettre le feu à l’appareil. Sans l’intervention de l’hôtesse de l’air qui lui a intimé l’ordre de laisser ses ardeurs pyromanes dans la soute, je ne serais probablement plus qu’un petit tas de cendres dispersé au dessus de l’Atlantique à l’heure actuelle.

Hormis ces quelques frayeurs, le voyage se poursuit sans encombres et sans sommeil et l’avion atterrit comme prévu à Roissy avec même trente minutes d’avance. Je peux enfin redécouvrir les joies du RER et du métro.

Pour ce premier soir en France, je dois dormir à Paris chez Natacha B., autrement surnommée Tissus par les intimes. La belle m’explique qu’elle taffe mais que « pas de problèmes, y’a une copine polonaise de Magda (sa coloc) à l’appart, elle t’ouvrira ». Me voilà donc au pied de l’immeuble, le doigt sur la sonnette. Au bout de la troisième sollicitation, une voix me répond dans un anglais teinté d’accent slave. Extraits.

-         « Yes ? How can I help you ?

-         Hi, I’m a friend of Natacha…

-         She’s not here, she’s t work

-         I know, but I’m supposed to sleep here tonight and she told me you would be here and you would open the door.

-         Well… I don’t know… I don’t know you and she told me nothing…

-         Listen, I’m arriving right from Canada, I made a seven hours flight, I have six hours of jetlag, I’m tired and i stink and I don’t have anymore patience ! »

 

Impressionnée par ma voix de mâle bourrée de testostérone et l’assurance à toute épreuve qui fait de moi un leader d’opinion naturel, elle finit par céder et déclencher le mécanisme d’ouverture. J’apprendrai plus tard dans la soirée que je lui ai fait un peu peur.

Après un rapide passage en revue de mes troupes parisiennes, une bise sur les fesses de chacun de mes comparses, il est déjà temps de prendre le TGV pour découvrir le Freddy Debize dans son nouvel habitat naturel grenoblois. Une expérience ethnologique des plus classiques puisqu’elle s’est terminée sur les coups de 2h du mat sur les bords de l’Isère parune discussion sur le sens de la vie, alors que dans le même temps, Raph Badel roupillait dur.

Le lendemain enfin, retour dans la famille et gestion de crise face au stress palpable de la sœur, esseulée à deux jours de son mariage, enterrement de vie de garçon oblige.

Le Beauf venait d’être kidnappé par la bande d’affreux qui bossent pour lui et jeté sans ménagement dans n camion de sa société, direction Marseille où il s’est vu poussé dans le Vieux-port, une pagaie dans la main, un hot-dog de l’autre bord, avec ordre de le traverser.

Marqué par l’expérience, il lui a bien fallu deux jours pour récupérer. Mais c’est frais et dispos qu’il s’est présenté devant les 130 invités réunis pour le voir renoncer à sa vie de pêcheur.

Visiblement émus, les deux amoureux se sont campés devant le maire de Buissard, dans une salle de 15 ou 16 m², qui même bondée, ne pouvait contenir plus du tiers des convives. Visiblement troublé par l’exercice (dans un hameau de 103 habitants, les mariages sont plutôt une denrée rare), l’édile haut-alpin bafouillait un discours haché, mâtiné d’accent champsaurin (« t’y es de Gap !? »). Un maelström verbal d’où n’émergeaient que certaines phrases compréhensibles du style « Voulez-vous prendre pour époux(se) ? ». Les deux futurs époux, à ce stade de la cérémonie avaient visiblement l’estomac plus noué encore que s’ils avaient dû se taper un grand oral à Sciences-Po. Non pas qu’ils doutaient de leurs sentiments, mais dans ces instants particuliers, un trou de mémoire ou un lapsus est vite arrivé, même quand il s’agit de dire simplement oui. Je vous rassure immédiatement, ils s’en sont tirés avec les honneurs du Jury présent. Les choses se sont corsées au moment de l’échange des alliances. Pour tout dire, il n’y a pas eu d’échange d’alliances. Trop émus, ils se sont saisis de leurs bagues respectives et après s’être demandé à quelle main il fallait la passer, l’ont enfilé sur leur index. Du moins, la sœur s’est-elle exécutée. Pour Yann, l’exercice s’est avéré plus délicat, la faute à un anneau trop étroit. Sous les yeux médusés de l’assemblée, il a bien pris cinq minutes pour réussir l’opération, avec force grimaces. Les grandes étapes de la vie sont toujours un peu douloureuses.

La fête qui s’en suivit fût mémorable et à la hauteur des attentes. Elle s’est terminée sur les coups de 6h30, ma sœur écroulée sur mes genoux.

Après toutes ces réjouissances, il a fallu s’en retourner de l’autre coté de l’Océan, le cœur un peu serré. Après un nouveau bref passage par Gre histoire de faire la bise à Sim’s et Gridou qui décidément m’impressionnent par leur exceptionnelle vie de grands reporters.

Le retour s’est déroulé sous de meilleurs cieux et sans l’ombre d’une crainte aéronautiquement fondée. Mais quelle ne fût pas ma surprise de découvrir que les transports en commun montréalais étaient en grève ! Ici, hormis des plages horaires bien définies, plus aucun bus ou métro ne circule.

Il a donc fallu se résoudre à prendre le taxi. Le chauffeur écoutait une station de radio où l’animateur était en train d’agresser verbalement un responsable syndical, lui indiquant son mécontentement de la situation à grands renforts d’insultes. Pour un Français habitué à une interruption du service public au moindre ticket restaurant supprimé, la scène était irréelle. Notamment lorsque ledit animateur s’est plaint de la trop grande fréquence des mouvements sociaux. Il expliquait sans sourciller que la STM en était à sa 15ième grève en 40 ans, soit « une tous les deux ans et demi ! C’est scandaleux ! On ne peux pas prendre les usagers en otage de la sorte ! ». Etonné par mes pouffements, mon chauffeur s’est enquis de la raison de mon rire.

« Oh rien, les Québécois sont un drôle de peuple ». La grève est une réalité culturellement déterminée.
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commentaires

G
Euh... Comment dire... Merci pour Moulboul, pour cette "incroyable vie de reporters" que nous menons avec Simon, j'attribue à ton "incroyable plume" ce commentaire extrêmement flatteur... Cependant, rendons à César ce qui est à César, en l'occurrence à cette institution française qui commence par Ass et se finit, non par hole mais par dic, puisque c'est grâce à cette institution que nous mangeons actuellement et nous n'avons encore que peu de reportages prévus à la publication. Voilà je rétablis la vérité pour ceux qui ne nous connaissent pas et qui auraient pu penser que tu avais des Yann Arthus Bertrand dans ton entourage ! on en reparlera quand on aura un reportage publié par mois !des bises
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L
Rien...sinon que par souci d'honnêteté journalistique tu aurais pu citer le Top DJ qui a permis que ta soeur s'endorme à 6h30 sur tes genoux aprés cette fameuse soirée mémorable qui l'a été grace à lui....Ce n'est pas du tout une question d'égo, c'est de la précision!!<br /> Sinon je ne te remercie pas pour GWB, et les enfants eux te remercient pour leurs cartes respectives....je te promets que dés que la carte postale avec le nabot présidentiel dans les jardins de l'Elysée sort tu y as droit!!!!....enfoiré!!!<br /> Good luck and hard job feignasse, désormais on se lève tôt et on travaille plus...<br /> Bises LGF
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