Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

PrÉSentation

  • : Moul Boul expérience
  • : Déambulations, observations et divagations d'un jeune journaliste français à Montréal.
  • Contact

Recherche

Archives

30 janvier 2008 3 30 /01 /janvier /2008 03:56

Où l’on apprend que venir à San Francisco c’est comme aller voir The Rock (le film, pas le tiers d’acteur), Sean Connery en moins, François Lainé en plus, que d’innocents week-end ski peuvent rapidement virer au cauchemar hivernal et que Moul Boul commence à réaliser l’ampleur de la décision qu’il a prise.

 

Voici donc près de deux semaines que mon avion s’est posé sur le sol californien. Comment sait-on qu’on est arrivé en Californie ? Il fait grand soleil, des palmiers balisent les pistes de l’aéroport et malgré des températures douces mais tout de même franchement éloignées de la canicule, les gars de l’autre côté du hublot travaillent en short. Je vais sciemment passer sous silence le choc (au bon sens du terme) que représente San Francisco. A peine vous dirais-je que le Golden Gate Bridge est bien aussi grand qu’au cinéma. L’écran 16/9ème le déforme à peine. Que Al Catraz est vraiment sinistre et que l’on se demande ce que ce morceau de décor hollywoodien fout au milieu de la baie. Que les tramways qui s’échinent à gravir les rues abruptes de la ville accrochée à la colline dans un mouvement incessant, font bien le plein de touristes consentant à voir leur portefeuille saigné à blanc. Que l’on passe en trois rues de l’Amérique moderne et progressiste qui fait la réputation de la Silicon Valley, à la vie trépidante et aux intonations asiatiques du plus grand Chinatown des Etats-Unis, au quartier de Mission, un avant-goût de Mexique, où se succèdent boîtes latinos, cantines à quesadillas et antiques cinémas abandonnés, la peinture de leurs enseignes écaillée et les lettres de leur dernière programmation pendant tristement.

Je laisse les photos vous décrire mieux que ne pourraient le faire mes mots, cette ville douce, érudite, métissée, escarpée.

Concentrons nous, si vous le voulez bien, sur ce qui fait l’intérêt de cette lecture, à savoir la mouise, les crasses, les tuiles, la malchance bref, la merde. Mais je vous rassure tout de suite, ça se finit bien à la fin.

 

SF, c’est comme au ciné, mais en vrai

Me voilà donc posé dans le salon de François, à deux rues du port et du Fisherman’s Dwarf depuis moins de trois minutes, en train de tenter vainement de me rappeler de mon prénom après avoir traversé l’Amérique du Nord de part en part, que celui-ci attaque avec le programme des réjouissances. On peut le résumer ainsi : « dans la semaine, tu te démerdes, je bosse, Connie bosse, et le week-end c’est ski au Lac Tahoe ! ». Ca tombe plutôt pas mal, je voyage toujours avec mes skis.

Ce séjour semble débuter sous les meilleurs auspices. Il fait un temps superbe au dessus de Bay Bridge (l’autre gros pont de San Francisco), je vais pouvoir faire marronner la famille en leur décrivant le spectacle que j’ai sous les yeux, les bulletins de neige laissent augurer d’excellentes conditions de ski et j’ai retrouvé mon vieux pote François, que je n’avais pas vu depuis plus d’un an.

Les deux premiers jours de ma virée californienne sont consacrés à la déambulation sans but dans les rues et sur la côte de San Francisco, le but recherché étant de réaliser que non, je ne rêve pas, tout ceci n’est pas un décor artificiel qui va s’évanouir le lendemain matin. La ville est tellement agréable que je commence à caresser l’idée de m’y installer. Puis je me rappelle que San Francisco fait partie des Etats-Unis et que je n’ai pas de carte verte à mon nom. Pourtant les douaniers s’évertuent à ma le rappeler à chaque fois que je traverse la frontière. Au bout d’un moment ça devrait rentrer !

Le week-end arrive comme prévu et avec lui la première mésaventure. Tout était prêt, la voiture de location était réservée, l’itinéraire imprimé, les forfaits de ski achetés. Rien ne devait enrayer cette organisation infaillible. A ceci près que ni François ni moi ne savions qu’au pays de l’efficacité économique et des heures sup’ en gros, les agences de location de bagnole ferment à…18h. C’est à se demander si EDF n’a pas pris des parts dans l’entreprise.

Bref, nous sommes arrivés à 18h10 et à notre mine sincèrement implorante, travaillée pour faire voler éclats toute forme de réticence à notre requête, a répondu un implacable « l’ordinateur est éteint, je peux rien faire. Revenez demain à 9 heures ». On quitte la France pour ne plus avoir à supporter ce genre de refrain, et on retrouve la même rengaine en VO non sous-titrée de l’autre côté de la planète dans un pays où la devise n’est plus depuis longtemps « In god we trust » mais « Vends ou meurs ».

Nous avons donc suivi les instructions bien poliment et sommes revenus le lendemain, à 10 heures par esprit de contestation, pour prendre possession de notre véhicule. Un heure plus tard, nous empruntions Bay Bridge direction le Nevada.

 

Sélection naturelle par la chaîne

Fort heureusement, la neige était au rendez-vous, le soleil en prime, ce qui a eu pour effet instantané de laver l’affront de la veille. Le soir en revanche, la neige s’est mise à tomber. Pas de quoi fêter un chat, d’autant plus pour quelqu’un arrivant en droite ligne de Montréal. Nous rendons l’équipement loué et empruntons le chemin du retour. A l’entrée de l’autoroute nous attend un embouteillage monstre. Trois heures d’attente à maudire en vrac Dieu, Bouddha, le ciel, Mahomet et Michel Drucker, nous accédons enfin à la source de cet inexplicable autant qu’incongru, ralentissement. La neige n’est même pas directement en cause puisque la route est largement dégagée et que seuls quelques flocons tombent paresseusement des nuages pourtant menaçants. Là, au milieu de l’Interstate qui relie Reno à San Francisco, une camionnette flanquée de deux feux rouges clignotant condamne à l’arrêt obligatoire toute voiture ne disposant pas de chaînes. Derrière elle se déroule un ruban parfaitement noir de goudron, sans un seul véhicule. Tout le monde est arrêté en vrac sur le bas côté, notice de montage dans une main, chaîne dans l’autre et moue interrogative de rigueur. Ce qui donne lieu à un business intéressant. Tous les 20 mètres, des agents proposent de monter les équipements de neige sur les pneus des moins débrouillards. L’opération coûte la modique somme de 30 dollars A ce tarif, nous décidons de mettre à l’épreuve notre sens de la débrouillardise. Après avoir commencé à monter le bordel (la fatigue de l’attente aidant et l’incompréhension du système de fixation nous obligent à utiliser ce vocabulaire quelque peu cavalier) à l’envers, nos voisins de galère qui disposent du même modèle nous viennent en aide. Et c’est fou comme quand on les prend par le bon bout, ces chaînes sont d’une facilité déconcertante à monter.

Nous voilà enfin autorisés à passer. Les vibrations sont insupportables. Il faut dire que ce type d’équipement en contact direct avec le bitume n’a pour résultat qu’une destruction méticuleuse de la route et des pneus. Trente miles plus loin, l’une des bandes métalliques qui entourent la gomme casse à force de rouler sur une route dégagée. Le temps de nous arrêter et la peinture du passage de roue gauche présente une plaie béante. Autant vous dire que la négociation concernant la couverture de l’assurance au retour a été plutôt intéressante. Heureusement, François sait très bien jouer la surprise et l’innocence.

Nous avons fini par rejoindre San Francisco sur les coups de deux heures du matin, les yeux collés de fatigue. Il a fallu lutter pour ne pas s’endormir au volant sur Bay Bridge.

 

Uncle Sam is watching you

Il est temps, avant que nous entamions la seconde partie de « Moul-Boul galère au ski », de faire une légère digression. Les mœurs Etats-uniennes au ski valent le coup d’être décrites. Du point de vue français tout fonctionne à l’envers. Il faut savoir que l’Américain au ski est extrêmement respectueux… des autres. Quand il y a une queue, il n’essaye pas de gruger tout le monde, il garde gentiment sa place. Quand ils ne sont que quatre alors que le télésiège a six places, ils cherchent désespérément deux personnes pour le compléter, histoire que tout le monde puisse profiter au maximum de sa journée de ski. Quand deux queues sont formées au bas des remontées mécaniques parce que deux pistes se rejoignent à cet endroit, il respect les panneaux indiquant « Alternez ». Mais le pire de tout, c’est que lorsque l’on prend le télésiège avec un Américain, il se sent obligé de poser des questions et de savoir d’où l’on vient. La seule chose, c’est que l’on ne sait jamais si c’est par souci sincère de l’autre ou pour compléter l’interrogatoire des douaniers.

Refermons ici cette parenthèse sensée faire le point sur l’incompréhension culturelle franco-américaine et avancer une explication sur l’animosité qui anime les deux pays.

Le moral peu entamé par les mésaventures du week-end précédent, nous reprenons la route vendredi dernier pour retremper les skis dans la neige. Cette fois-ci pas de ratés au démarrage. La voiture est en notre possession en temps voulu. Quand François et Connie arrivent à l’appartement, elle est chargée, le plein fait et nous n’avons plus à nous préoccuper que de conduire. L’aller se déroule sans troubles. A peine devons nous monter les chaînes pour les 30 derniers miles recouvert d’une véritable couche. Une autre des pièces métallique saute sur l’autre roue, mais nous avions prévu le coup et protégé les passage de roue avec du scotch. La voiture a à peine réagi.

Le samedi, un grand soleil nous accueille et révèle un bon 40 centimètres de poudreuse fraîche et légère. Mes skis ne sont pas assez large pour surnager dans autant de peuf. Ca faisait longtemps que je n’avais plus skié avec de la neige jusqu’aux genoux. Mais quelle joie !!

Pour ne rien gâcher, l’hôtel propose un jacuzzi en extérieur pour délasser les muscles meurtris par l’effort. Ce week-end est clairement placé sous un signe bien plus clément que le précédent.

Le lendemain, le temps est moins bon. La neige tombe sans discontinuer, mais la visibilité est bonne et une course entre les sapins s’engage entre François et moi.

 

« Mais il nous fonce dessus ce con »

Sur les coups de 15h30 nous décidons d’abandonner le terrain de jeu. Connie montre des signes de fatigue, mon pied gauche est en morceau, la faute à des chaussures de ski trop serrées. Nous reprenons donc la route alors que la neige s’intensifie. Mais pas d’inquiétude à avoir, nous sommes équipés et désormais expérimentés pour faire face aux conditions les plus extrêmes… du moins le croyions nous.

Pas de queue au moment de rentrer sur l’autoroute. Nous passons le van de contrôle des chaînes en ralentissant à peine. Un panneau orange éclatant nous invite à faire preuve de prudence sur la route. Ca tombe bien c’est plutôt notre genre !

Après une dizaine de miles, l’autoroute commence à se frayer un chemin dans les montagnes environnantes. Le trafic devient un peu plus dense et nous roulons à moindre vitesse. Mais vu les conditions extérieures, rien que de plus normal.

Mais au sortir d’un virage, trois camions sont bloqués au milieu de la chaussée. La neige et le vent qui se sont levés ne nous permettent pas de voir ce qu’il se passe au delà. Nous arrêtons la voiture derrière les mastodontes, en profitons pour insulter les services de l’autoroute qui n’auraient jamais du laisser ces camions emprunter la route par de telles conditions, sur le mode de « En France, on n’aurait jamais vu ça ». Mais notre conversation enjouée est interrompue par l’arrivée en urgence d’une voiture d’assistance. Mais surtout par le fait que l’énorme 38 tonnes devant nous se remet à bouger. Mais pas dans le sens désiré !

La neige sous les pneus du mastodonte laisse progressivement apparaître une épaisse couche de glace vive à mesure que la remorque glisse droit sur nous.

La vague impression d’être dans un mauvais cauchemar laisse place à un frisson de peur qui nous parcoure la colonne vertébrale. La queue derrière nous ne nous laisse aucune option, aucune échappatoire. La voiture d’assistance se colle contre la remorque et tente de la pousser. Ce faisant, le conducteur perd toute adhérence et part en travers, menaçant d’accrocher la voiture devant nous. Finalement, une énorme dépanneuse accroche le camion par l’avant et stoppe la glissade à défaut de pouvoir le tracter.

Une petite ouverture est visible entre les trois camions bloqués. La décision est rapidement prise. Il est temps de se faufiler sans demander notre reste.

Mais le niveau de stress n’a pas le temps de redescendre. Nous n’avons pas fait trois cent mètres que le blizzard se lève et qu’un véritable rideau de neige se forme devant le pare-brise, nous masquant le bout du capot de la voiture. François conduit au ralenti pendant que je le guide en fonction de notre proximité que je perçois avec les bancs de neige sur notre droite.

Tout ça commence à franchement sentir mauvais et nous parvenons à garder notre calme par je ne sais quel miracle. Nos premiers réflexes sont de vérifier le niveau de charge de nos téléphones et celui du réservoir (« Je sens qu’on va passer la nuit ici »).

 

Système D

A force de persévérance et de maintien de notre vigilance grâce à un taux bien trop élevé d’adrénaline dans le sang, nous arrivons à passer le point culminant de l’autoroute. Juste après, si le blizzard et la neige se maintiennent, la visibilité s’améliore un poil.

La voiture commence à reprendre une allure potable pour les conditions exécrables auxquelles nous faisons face. Les muscles du cou et du dos commencent à se relâcher. Pas pour longtemps ceci dit puisque une ou deux miles plus tard, un bruit sourd commence à se faire entendre dans le passage de roue gauche. Un deuxième filin d’acier vient de rendre l’âme. Le diagnostic est rapidement établi : nous avons des chaînes de merde !

Nous sortons dans le froid pour scotcher la tige métallique qui menace d’arracher la carrosserie. Mais un autre problème se fait jour. Avec deux filins en moins, la chaîne est franchement lâche et il faut à tout prix la resserrer. D’autant plus que les Américains semblent penser qu’un chasse neige pendant une tempête de neige n’est pas quelque chose d’absolument indispensable. Si on la retire, on ne redémarre plus ou au mieux, on s’envoie dans le décor au bout de 500 mètres.

Je fonce donc dans le coffre à la recherche d’un bout de corde, du fil de pêche, un kit de couture, n’importe quoi mais quelque chose qui nous aide à ne pas rester plantés là ! Vaine excitation puisqu’il n’y a là absolument aucune ressource de ce type. Puis mon regard se pose sur mon sac à dos, pourvu de deux sangles pour le fermer. Pas le temps de réfléchir que déjà mon briquet entame la résistance de l’une des deux. Une fois découpée sommairement, j’entreprends de fixer l tout à la chaîne qui ne rechigne pas à se tendre. On renforce les nœuds au scotch et l’on prie pour que le tout tienne jusqu’à ce que l’on sorte de cette galère. Après une heure de descente la neige s’estompe et laisse la place à la pluie. Nous pouvons enfin nous arrêter sur le bas-côté et enlever les restes de chaînes encore accrochés aux roues avant. Détail intéressant, pile à l’endroit où nous nous sommes arrêtés, deux chaînes d’un modèle identiques aux nôtres ont été jetées avec rage dans le fossé par un autre conducteur insatisfait de son équipement.

Seul le souci de ne pas compromettre l’avenir de l’humanité nous a poussé à ne pas faire de même et à attendre d’arriver à San Francisco pour nous débarrasser de ces merdes.

C’est tout pour notre série « Moul-Boul galère » d’aujourd’hui. Dans deux jours je reprends l’avion pour Mexico. La pression commence à se faire une place à côté de mon estomac. J’ai un appartement. Avec deux colocs. L’un est Mexicain, l’autre Espagnol. Comme dirait Romain Duris dans L’Auberge Espagnole « Dans deux mois je parle un espagnol de puta madre ! ». Oui, parce que j’ai oublié de mentionner qu’ils ne parlent qu’espagnol.
Partager cet article
Repost0
18 janvier 2008 5 18 /01 /janvier /2008 05:29

Où l’on apprend que Moul Boul a passé deux semaines et demi terribles au Mexique, qu’à Acapulco on trouve la plage, le soleil et les contrats de mariage et que parfois une langue se fraye naturellement un chemin dans la bouche d’une Mexicaine.

 

Tout commence par un jeudi pluvieux à l’aéroport de Montréal, ou plutôt non, tout commence vraiment dans le Terminal  de O’Hare, l’aéroport de Chicago quelques heures après. En raison d’un accès de francophilie aussi soudain qu’incompréhensible, les pilotes de Mexicana ne trouvent rien de mieux que de faire grève. À force d’échanges musclés avec les employés de la compagnie aérienne, nous apprenons que l’airbus qui devait se trouver à la porte 39 n’a pas encore décollé de Monterrey et ne sera dpas disponible avant au moins huit heures. La blague ne fait rire personne et pousse la plupart des voyageurs à griller clope sur clope à l’extérieur. C’est ainsi que je fais la connaissance de Patrick, Franco-Mexicain qui attend, lui, depuis 44 heures à Chicago, la faute à des douaniers américains tatillons quant à sa double origine. Il devient rapidement un compagnon de picole au bar de l’aéroport et à force de se payer respectivement des tournées qui nous coûterons le double en frais bancaires, on commence à en savoir pas mal sur la vie de l’un et de l’autre. J’explique à Patrick que je fuis le froid québécois pour deux semaines et demi et que comme mon visa expire sous peu, je vais en profiter pour voir si le pays me plaît, afin d’en faire une potentielle destination pour après. Et là le bonhomme m’explique que sa famille bosse dans le textile en banlieue de Mexico et que son père a des accointances particulières avec l’ambassadeur hexagonal. Il me file son adresse mail, m’enjoignant de le contacter si jamais j’avais des questions ou besoin d’aide, si le projet se concrétisait.

Notre avion finit par arriver et nous passons les 5 heures de vol à ronfler sur l’épaule du voisin, le sommeil sérieusement encouragé par l’abus de boisson alcoolisée. Nous finissons par quitter l’aéroport de Mexico sur les coups de 4h du mat’ après la fouille de bagage la plus sommaire à laquelle il m’a été donné d’assister. Nos chemins se séparent à la station de taxi, non sans avoir fumé une ultime cigarette.

 

« Tu vas pas te faire racketter »

Je dois traverser la ville entièrement, Ana n’ayant rien trouvé de mieux que d’habiter à l’opposé du tarmac, dans un taxi douteux conduit par un chauffeur qui marmonne uniquement en espagnol. À 5 heures du matin, les rues de la mégalopole sont vides. Pas un chat sur les artères généralement congestionnées de bouchons. Il y a là quelque chose d’irréel et d’inquiétant. Mais pas de panique, Patrick me l’a confirmé, « si tu prends les taxi de l’aéroport tu ne devrais pas te faire racketter ». Nous finissons par arriver aux abords de la maison d’Ana, après une heure de route et à grands renforts de Derecha et Izquierda, je finis par mettre le doigt sur sa sonnette. Je peux enfin entamer ma première nuit en territoire mexicain.

Le séjour débute sous de bons auspices. Ana, que je ne connaissais que peu s’avère être une compagnonne des plus drôle. À la fois caustique, sarcastique et franchement délurée. Et chose rare, elle semble comprendre et apprécier mon humour douteux. Les fêtes de Noël passées dans sa famille ont été des plus plaisantes. Je découvre assez rapidement l’une des qualités des Mexicains : l’hospitalité. Pour ne rien gâcher, la région déchire, tant du point de vue des paysages que des villes traversées. Quérétaro, Léon et surtout Guanajuato, présentent de charmants centres-villes avec des places bordées de terrasses. Et franchement, quel luxe de pouvoir lever le coude en plein cœur de l’hiver en t-shirt. Ne manquait qu’une poignée d’amis Français (ils se reconnaîtront) pour que tout soit parfait.

C’est au cours d’une de ces douces soirées, à Guanajuato justement, que nous avons assisté au plus improbable des spectacles : une battle de Mariachi. Souvenez-vous (si, si) du film Eight Miles. Remplacez Eminem et son vis-à-vis par deux groupes de Mariachi, la scène par une terrasse de bar bondée et vous aurez une vague idée de ce que mes yeux n’osaient croire. Tout d’un coup, les premiers accords de « Lose Yourself » se sont mis à résonner dans mes oreilles. Ce qui est assez déroutant dans une battle de Mariachis, c’est qu’aux provocations, à l’arrogance des paroles et à la violences des beats de hip-hop, il faut substituer les sourires crispés de chanteurs qui tentent de séduire leur audience, des accords d’une tristesse infinie et des paroles à pousser à l’automutilation Monsieur sourire. À peine le dernier accord d’une chanson s’est-il tu que déjà le second groupe a déjà entamé sa complainte. Cet épisode aurait probablement inspiré à Alain Chabat un nouveau numéro des « Avez-vous déjà vu…? »

 

Mais comment ça?

Mais c’est toujours lorsque le décor paraît paisible que le drame se trame en coulisses. Après un bref retour à Mexico City, nous prenions la route d’Acapulco pour quatre heures de bonheur sur les autoroutes défoncées de cette partie du pays. Personne ne respecte les limites de vitesse jusqu’à ce que la voiture décolle sur une aspérité un peu abrupte. Le fait de croiser des voitures en panne, renversées ou ayant perdu une roue pousse également à rendre le pied moins pesant sur l’accélérateur.

Mais ça n’est pas ici que le drame se noue. Revenons un poil en arrière afin de mieux comprendre ce qui s’en vient.

Avant de partir au Mexique, j’ai formulé une requête précise à Ana.

« S’il y a une seule chose sur laquelle je ne transigerai pas, c’est que je veux aller à la plage, même deux jours… Il fait -20 à Montréal (trémolos dans la voix), c’est la seule chose que je demande.

-         Ok, si tu y tiens. Ca tombe bien, Valéria nous invite à passer quelques temps dans la maison de ses parents à Acapulco.

-         C'est-à-dire que ça m’emmerde un peu, je suis pas très à l’aise de me pointer chez eux comme ça. Si tu veux, on peut aller à Acapulco, mais je préfère prendre un hôtel.

-         Mais arrête!! C’est tes scrupules de Français ça! Elle nous invite, du coup ça va pas nous coûter cher.

-         Bon, ok, on y va »

Après les quatre heures de route susmentionnées, un colonne vertébrale douloureuse et deux centimètres en moins au garrot et non sans être aller goûter l’eau au préalable, nous sonnons chez les Ramirez. Ce que j’ignorais alors, c’est que la famille de Valéria au grand complet, père excepté (« mais il sera là demain! ») était réunie. Pas franchement l’idéal pour se sentir à l’aise. Je partage assez rapidement mon mal-être avec Ana. Elle non plus ne semble pas super à l’aise. Mais la soirée arrive et des verres de Cuba Libre se retrouvent devant mon nez sans que j’aie à les exiger. Du coup, je me détends aussi sûrement qu’une pilule de xanax rend le membre viril flasque.

La soirée avance gentiment, entrecoupée de francs fou rires. Au fur et à mesure que l’alcool coule dans mon gosier et que mon verre se re-remplit, je comprends de mieux en mieux l’espagnol. Valéria ne m’adresse absolument pas la parole, mais ça me convient et je m’en tape même carrément. Je suis à la plage, il fait beau, tout le monde semble m’apprécier. On peut imaginer pire comme situation.

Sur les coups d’une heure du mat’, Ana et Valéria vont se coucher. L’ambiance me satisfait, donc je continue à boire. A peine cinq minutes se sont écoulées que la mère de Valéria se rapproche de moi et me parle avec un air un peu grave.

Devant mon air dubitatif (je ne faisais qu’imaginer que je comprenais l’espagnol), son cousin me traduit les paroles de sa tante.

« Clément, j’aimerais que tu sois mon gendre, tu sais, ma fille est un peu immature, mais attends la, dans trois ans, elle changera d’avis »

Sous les couches d’alcool qui embrument mon esprit, un éclair de conscience surgit et une voix hurle dans ma tête « mais c’est quoi encore ce bordel dans lequel je me suis fourré?? ». A l’extérieur, rien ne sort de ma bouche. Je me contente de fermer ma gueule et de sourire. La voix m’informe qu’il serait probablement assez malpoli de répondre du tac au tac qu’il en est hors de question et surtout que je risque de me retrouver à la rue dans la seconde qui suit. Le problème, c’est que l’enthousiasme de la mère semble contagieux et tous les membres de la famille en chœur alignent les arguments afin de me convaincre du bien-fondé de cette requête.

 

Lave toi les oreilles!

Je vais me coucher avec le vague espoir que j’ai vécu un mauvais rêve.

Le lendemain, j’arrive à prendre Ana à part et je lui demande si elle a entendu le drame qui se tramait dans le salon la veille au soir. Devant le secouage de tête qui s’ensuit, je lui expose la situation telle que je l’ai vécue.

« C’est pas la version que j’ai.

-         Comment ça? Et t’as quelle version?

-         Ils sont tous persuadés que tu es venu au Mexique pour te marier.

-         QUOI??? Mais comment ça a pu leur traverser l’esprit?

-         Valéria est persuadée que tu l’aimes encore.

-         Oh bordel, il faut qu’on se casse! »

Ajoutez à cette situation des moins confortables que le cousin de Valéria, très sympa au demeurant devient moins fréquentable quand il est bourré. Le jeune homme a soudain des tendances homosexuelles et m’a fait quelques propositions plutôt précises impliquant deux pénis et deux anus. Bref, il était temps de quitter Acapulco avant que le délire d’aller se baigner en plein décembre ne perde tout son charme.

Heureusement, nous devions rentrer à Mexico pour le nouvel an. Avant que nous ne prenions la route, les Ramirez m’ont quand même demandé si je ne voulais pas rester avec eux. L’argument de la route longue et difficile que je ne voulais pas laisser Ana arpenter seule a porté ses fruits.

Nous finissons par quitter sans trop de regrets (au moins pour moi) Acapulco. J’en garde d’ailleurs un souvenir impérissable puisque trois jours après j’avais le cul posé dans le cabinet d’un docteur pour me faire déboucher les oreilles. Ana lui a d’ailleurs servi d’aide soignante et a pu apprécier de près toute la merde qui en est sortie.

Il faut croire que cette expérience intime nous a rapprochés puisque le lendemain ma langue trouver un moyen de rejoindre la sienne.

Il a ensuite fallu rentrer à Montréal pour m’acquitter de la dernière semaine et demie de travail que je devais au gouvernement québécois. Puis dire au revoir le cœur serré à mes collègues de travail qui au fil de l’année sont devenus (devenues?) plus que de simples collègues.

Et maintenant, le périple continue. Je suis à San Francisco, accueilli par François, mon designer préféré et son adorable copine Taïwanaise, Connie. Dans deux semaines, je reprends l’avion pour Mexico.

Et aujourd’hui un enculé a tenté de m’écraser avec sa putain de bagnole pourrie. Probablement un électeur de Bush frustré de se retrouver dans un fief démocrate.
Partager cet article
Repost0
8 janvier 2008 2 08 /01 /janvier /2008 01:42

Où l’on apprend qu’une tête de pine avec une motoneige, c’est comme un supporter Lensois avec des dents : improbable! Que Boubounette a dû quitter à regrets sa vie de superstar québécoise et qu’il est temps pour Moul Boul de cogiter sur le (non)sens du labeur sous le soleil de Mexico.

La déception de ne pas voir New York ensevelie sous 60 cm de neige, nous prenons la route Tête de pine et moi sur les coups de 7h du mat’ le dimanche matin. Le fond de l’air est aussi mordant que l’azur dégagé. Au saut du lit, les yeux encore tout collés de fatigue, le traitement a le mérite de nous réveiller. Ça tombe bien, il nous reste encore deux heures et demie de route pour nous rendre à destination.

Le thermomètre incrusté dans le tableau de bord du Jeep nous confirme l’impression première de notre épiderme. Il fait un bon -13 des familles en plein centre-ville de Montréal. Pas de quoi inquiéter un québécois, d’autant plus que le vent ne souffle pas, mais quand même suffisant pour refroidir les sudistes hexagonaux que nous sommes.

Sur la route, l’ambiance alterne entre le traditionnel concours de vannes quotidiennes qui nous sert de mode de communication (remporté haut la main par votre serviteur) et les vieux tubes des Rolling Stones, U2, les Doors et Bruce Springsteen que déversent les hauts-parleurs de la voiture branchés sur CHOM Fm. Au fur et à mesure que les kilomètres s’écoulent et que les buildings de la banlieue montréalaise disparaissent à l’horizon, la température tombe doucement mais sûrement. Au moment d’attaquer les petites routes sinueuses et enneigées des Laurentides, l’écran digital affiche fièrement un -22 qu’il ne lâchera plus jusqu’à notre destination.

D’un coup, l’idée d’arpenter les pistes de la forêt Laurentienne, accélérateur calé à fond avec la bise coupant nos visages tendres me paraît moins attrayante. Si c’est pour finir par une chirurgie reconstructive du visage avec la peau de mon cul, je suis pas chaud. Faisant part de ma préoccupation à tête de pine (qui de toute façon devrait envisager la chirurgie reconstructive, quoiqu’il arrive), celui-ci me répond avec tout le tact qui le caractérise « va te faire chauffer une raclette tromblon, froid ou pas froid, je vais te mettre minable! »

Encore 40 bornes de petites routes enneigées à se prendre pour Tommy Makkinen lors d’une spéciale en Suède et nous stoppons notre grosse cylindrée dans le jardin de Jean-Pierre, jovial breton dans le début de la cinquantaine qui sera notre guide de motoneige, non sans avoir bu café et mangé tartines au Vieux St-Émile, à la sortie d’Entrelacs.

Jean-Pierre est un gars responsable, qui aime la vitesse si elle est encadrée par tous les dispositifs de sécurité nécessaires. S’il y a bien une chose que le bonhomme n’accepte pas, c’est les beaufs marseillais qui au mépris de la nature et des machines, sont prêts à sortir de piste au premier virage, pourvu qu’ils fassent un bon chrono. Afin de prévenir ces tendances suicidaires, il a un truc infaillible Jean-Pierre. La caution à 1500 dollars. Fais une rayure sur le capot de la bête et les vacances au Mexique tu te les enroule dans du papier d’alu et tu te les care dans le c…!

Afin de détendre l’atmosphère singulièrement refroidie par cette épée de Damoclès fixée au dessus du casque, Jean-Pierre raconte des blagues. Des boutades canadiennes à base d’ours, de femmes et de nudité à caractère sexuel. Ce faisant, il nous conduit devant nos montures qui frétillent d’impatience. Nous sommes les premiers clients de la saison. Jean-Pierre et son associé ont à peine eu le temps de monter deux motoneiges, pris au dépourvu par les caprices de la météo qui a recouvert l’intégralité du Québec. Les pistes ne sont même pas damées, il va falloir les ouvrir. C’est mon dépucelage de motoneige et on commence direct par le hors-piste. C’est un peu comme commencer par le marteau-pilon guatemaltèque quand on n’a jamais trempé la biscotte.

La première partie de la ballade se fait au ralenti. Nous enchaînons les passages techniques sans presque jamais nous asseoir sur la selle. Les devers se succèdent et le seul moyen de les franchir consiste à se tenir debout sur l’un des deux marchepieds, le cul penché dans la neige à l’extérieur de l’engin. Cela ne nous empêche bien évidemment pas de nous embourber et de découvrir les joies des techniques pour sortir la motoneige de son écueil. Il fait certes -22 mais aucun de nous ne ressent la morsure du froid. Au contraire, alors que mon corps reste habituellement indifférent à la chaleur estivale sur les plages des Calanques, je sue corps et bien sous mes cinq couches de vêtements.

La deuxième partie des réjouissances est moins technique et donne libre cours à nos hormones. Alors que jusqu’à présent nous devions brider notre pouce posé sur l’accélérateur au risque d’embrasser rudement l’écorce des Érables, l’heure est maintenant venue de lâcher la cavalerie. Et comme nous sommes entre frères, la règle de « C’est moi qu’a la plus grosse (accélération, bien sûr)! » fonctionne en plein.

La course poursuite bat son plein jusqu’à ce que nous nous retrouvions devant une piste vierge. 80cm de pure peuf sans une trace. Et Jean-Pierre nous offre d’ouvrir la marche pour découvrir le méchant feeling du freeride en motoneige.

Tête de pine décide de passer en premier, invoquant un droit d’aînesse dont la validité ne m’apparaît toujours pas évidente. Bien mal lui en prend puisque au bout de 500 mètres, après avoir parfaitement négocié un virage piégeux et dans une belle ligne droite où trois semi-remorques auraient pu se croiser de front en laissant la place pour deux ou trois voitures, il sort de la route et se plante comme une merde dans le fossé, la motoneige renversée sur le côté. En guise de compassion fraternelle, je me dépêche de sortir l’appareil photo pour immortaliser l’échec de celui qui entendait donner des leçons de pilotage à Jean-Pierre, quelques secondes auparavant. Après m’en être donné à cœur joie  (« Alors Ayrton Senna, on a de la misère à tenir le guidon droit ?»), et avoir sorti l’engin de son trou (la motoneige, pas mon frère), c’est à mon tour de prendre les devants.

La sensation est terrible, la machine s’enfonce, ressort, semble flotter sur une mer de coton. On retrouve les sensations du ski hors-piste, et franchement ça fait plaisir. On prend rapidement confiance et insidieusement, on titille l’accélérateur plus fort. En pleine confiance, je prends le temps de repenser à la mésaventure de Tête de pine. Faut-il être mauvais pour se manger dans des conditions pareilles. Tête de pine porte définitivement bien son surnom.

Absorbé par ces belles pensées, je ne sens que trop tard que ma moto commence à pencher dangereusement sur la gauche. Trop tard pour rééquilibrer! Je retourne la machine à mon tour. Autant vous dire que Tête de pine en a profité pour rire à gorge déployée, fier de tenir là sa vengeance.

Pour vous la faire courte, boubounette a ensuite repris l’avion avec son père et son grand-père mais visiblement n’envisageait pas de quitter son tonton adoré puisque j’ai retrouvé trois de ses doudous sous ma couette, qu’elle avait sorti de la valise qu’était en train de faire mon frère. Une semaine après, j’avais le cul posé dans l’avion direction le Mexique, pour deux semaines et demi excellentes et pleines de rebondissements que je vous conterai très bientôt (si, si). Pour vous tenir en haleine, sachez que ça s’est très bien passé, sauf au retour.
Partager cet article
Repost0
15 décembre 2007 6 15 /12 /décembre /2007 01:59

Où l’on apprend une fois de plus que les frontières américaines sont aussi ouvertes que les cuisses d’une nonne frigide, que la destruction méticuleuse de l’appartement de Moul Boul par Boubounette ne présente aucun retard sur l’échéancier et qu’il est possible de transpirer comme jamais par -22 en pleine forêt canadienne.

 

Vous l’aurez compris, une crise de Boubounite aiguë doublée des symptômes paternel et têtedepineseprendpouruntrappeur m’a tenu éloignée de mon clavier ces derniers temps. Cela ne veut pas dire que rien ne se passe dans ma vie d’immigré français finissant (oui, mon visa ne sera pas renouvelé). Bien au contraire, la venue en mes terres hostiles d’un bout de ma cellule familiale a été prétexte à bien des aventures dont je vais vous conter une partie.

Comme tout bon Français qui s’en vient visiter Montréal, les premières paroles de mon frère, le pied à peine posé sur le tarmac de l’aéroport Trudeau furent « quand est-ce qu’on part à New York? » C’était d’ailleurs son leitmotiv depuis qu’il m’a annoncé sa venue en compagnie de notre paternel. « Et tu nous amène à New York, hein? » me disait-il ainsi lors de notre premier échange téléphonique sur le thème.

Du coup, dès leur arrivée, nous mettons en place toute l’organisation logistique nécessaire pour assurer un week-end mémorable. Repérage de l’itinéraire sur Google maps, négociation de poussette avec les collègues de taf, réservation de la chambre d’hôtel sur les bords de l’Hudson avec vue sur Manhattan, briefing familial sur le sens de l’humour chatouilleux des douaniers américains (« Non Laurent, si tu montres ton cul aux douaniers ça ne fera rire que toi »). Bref, tout semblait sous contrôle.

 

Born in the USA

D’autant plus que dans un accès d’américanophilie, mon frère a insisté pour que nous louions un jeep grand Cherokee histoire de vivre le rêve américain et le cauchemar écologique jusqu’au bout. Précisons à ce stade de l’histoire que celui que nous appèlerons par souci de préserver son anonymat, « tête de pine » s’est éhontément servi de sa paternité pour justifier la location de la plus grosse bagnole au catalogue. Il a d’abord tenté de me convaincre en me sortant des théories fumeuses sur la nécessité dune large banquette arrière pour que ma nièce puisse y dormir durant les six heures de route qui nous séparaient de la Grosse Pomme. Devant mon air dubitatif et visiblement peu réceptif au stratagème du confort de ma nièce, il revint à la charge avec des arguments autrement plus convaincants. Deux mots ont suffi à me faire changer d’avis : « 4.7l, 250 chevaux »!! J’avoue, mon cerveau n’a pas pris la décision, mes hormones s’en sont chargées. Nous restons d’éternels petits garçons, on change juste de jouets.

Mais tête de pine n’est pas prêteur et ce n’est qu’à regrets qu’il daigne parfois me laisser le volant.

Bref, nous avions donc parfaitement planifié le voyage. Dans la voiture, dont nous avions nettoyé le blason Jeep, nous avions disposé bien en évidence une bouteille de Coca tandis que le système audio crachait les riffs rageurs de Foo Fighters. Que du 100% Oncle Sam dans le but non dissimulé de faire bonne impression à la frontière.

Nous voilà donc partis sur les coups de 1h du matin dans la nuit du vendredi avec pour objectif de rallier New York pour le petit déj’. Je sentais déjà l’odeur du café et des œufs brouillés pris sur Times square alors que la ville sort peu à peu de sa torpeur matinale.

Chacun de nous gardait même la main sur le couture de la poche prêt à dégainer à la moindre demande, nos précieux passeports. Dans ce contexte, la nouvelle amitié affichée de notre Sarko national avec son nouveau meilleur pote George ne nous laissait que peu de chances d’entrevoir l’infamie dont nous serions victimes.

 

De l’intérêt d’abandonner son père

Après une heure de conduite en demi-sommeil (cruise control branché et trois virages seulement pour briser la monotonie de l’autoroute, on a quand même fait moins somnifère) les projecteurs de la terre promise nous enveloppent de leur bienveillante clarté. Passe encore le regard soupçonneux du jeune officier qui le premier prend nos passeports. Les choses se gâtent quand nous nous présentons au guichet des douanes où l’un de ses collègues vient vers nous, tenant dans ses mains nos pièces d’identité. À son air, quelque chose cloche. Il me demande de m’approcher.

« Il y a un problème avec ce passeport », me dit-il en me désignant la photo d’identité pourtant joviale de mon père.

« De quel genre? Quel est le problème?

-         Ce passeport n’est pas valide.

-         Comment ça pas valide? C’est un modèle Delphine, mais il est valable pour passer aux États-Unis. Mon frère a exactement le même. C’est quoi le problème.

-         C’est la photo, elle n’est pas aux normes.

-         Mais celle de mon frère non plus alors…

-         Non, pas de problèmes pour votre frère.

-         Donc c’est quoi la suite?

-         Ben vous trois, vous pouvez passer aller à New York si vous voulez, mais pas votre père.

-         Et vous pensez que je vais le laisser là?

-         Je ne sais pas, à vous de voir »

J’ai bien essayé de plaider la cause de mon père et le fait que nous n’avions prévu que de passer deux jours à New York, rien à faire! Je le redis une fois encore, on ne gagne jamais contre un douanier US.

Pour être bien sûr que nous ne nous représenterions plus, le bonhomme a tout de même récupéré les empreintes digitales et pris sa trombine en photo. L’histoire ne dit pas s’il a souri.

 

Oh Canadaaaaa!!!

Au bout d’une heure de tripatouillage d’ordinateur, Woody (il ressemblait pas mal au réalisateur éponyme, tout aussi névrosé, mais moins comique) nous raccompagne à la voiture et m’explique que je dois aller faire demi-tour un poil plus loin et revenir vers le poste frontière canadien afin qu’il nous remette nos passeports.

Nous remontons dans le 4x4 et comme de bien entendu, je commence par me planter d’itinéraire, n’ayant rien compris des explications du douanier, en me dirigeant d’une pédale d’accélération décidée, droit sur les Etats-Unis. Je réalise mon erreur lorsqu’une nuée de points rouges peu engageants commencent à balayer la carrosserie. Devant tant d’arguments convaincants et la sonore poésie de mon frère (« Putain, tête de vier, t’as encore rien compris!! Va t’acheter des cours d’anglais! »), je rebrousse chemin direction Woody.

Il nous remet les documents et nous souhaite un bon retour au Canada. Tellement charmant.

 

Welcome back!

À ce stade, vous vous dites que l’histoire est finie. Oh que non!

Parce qu’une fois que les Américains t’ont refusé l’accès à leur territoire, les Canadiens deviennent soupçonneux en crisse. Alors que nous pensions retourner à Montréal sans autre forme de procès, la première question du douanier ne laisse rien augurer de bon.

« Pourquoi on vous a refusé l’accès?

-         C’est un problème de photo sur le passeport de mon père.

-         Y’a aucun problèmes avec ces passeports. C’est qu’il doit y avoir autre chose!

-         Autre chose???

-         Avez-vous un dossier criminel?

-         C’est une blague?

-         Garez-vous là bas et rentrez dans le bâtiment, nous allons procéder à certaines vérifications. »

Et rebelote pour une heure supplémentaire. Bref, la joie des voyages (des)organisés.

Le retour vers Montréal s’est passé sous le signe d’un concours de synonymes avec pour thème l’amour immodéré des Français pour les States, remporté haut la main par un Laurent furibard qu’il a fallu calmer pour l’empêcher de découvrir contre son gré les vertus des voyages gratos sponsorisés par le gouvernement canadien.

Du coup, il a fallu trouver un autre plan. Ok nous avions une chambre d’hôtel dans le cul, mais ça n’était pas ce qui allait nous abattre.

Après avoir écarté la suggestion plus que malvenue de Laurent qui sur un ton candide me demandait « et si on allait à Toronto? », nous décidâmes de prendre un brin de repos et de nous casser aussi sec dans les Laurentides pour admirer les paysages et se tirer la bourre en Motoneige. Ledit épisode fera d’ailleurs l’objet d’une note très prochaine. Mais celle-ci étant déjà suffisamment longue, et vous entendant réclamer grâce, je vous infligerai un autre calvaire littéraire plus tard.

Partager cet article
Repost0
18 novembre 2007 7 18 /11 /novembre /2007 01:28

Où l’on apprend que l’attrait du Québec varie au rythme de la température place Jacques Cartier, que la même logique s’applique au pays de la sauce Salsa et de Luis Mariano et qu’introduire une réceptionniste déjantée dans un musée des beaux-arts peut rendre une visite chiante à en crever en une divertissante expérience.

 

19 juillet 2007 : Le Québec est un pays (une province, une nation, un bout de territoire, un point sur la carte, un groupe de gens avec un accent rigolo ?) merveilleux. Il fait un temps magnifique, les journées sont longues et chaudes, la vie culturelle bat son plein. On a du mal à faire son choix entre le festival de Jazz, le festival du rire, le Grand Prix… Le soir, les terrasses de la rue Crescent sont pleines, la température est douce comme les jambes des femmes, que cachent à peine leurs robes légères. Ahhh… (soupir de contentement), j’adore le Québec! Et puis les gens sont adorables. Faut que je songe à m’installer ici, engrosser une pitoune et investir mon PEL dans une Volvo break, des pneus neige et un colley type Lassie.

 

12 novembre 2007 : Putain, ça fait déjà une semaine qu’on se tape notre -3 quotidien et on est que début novembre. Et encore aujourd’hui c’est fête, on n’a pas de vent et il fait soleil! Il neige comme Rocco qui éjacule sur la Côte-Nord et comme disent les vieux ici « Quand y neige sur la Côte-Nord ça va pas fort! » Il fait nuit noire à 16 heures et le moral commence à être sérieusement entamé par les assauts du climat hostile. La seule distraction notable dans le néant culturel montréalais pré-hiver consiste en un pseudo salon du Bourget avec la venue de l’A380 à l’aéroport Trudeau. C’est décidé, je hais le Québec! En plus les rues s’affaissent, les ponts tombent au même titre que le toit du stade olympique. Je ne veux plus entendre les Français chialer sur la température de cul dans l’Hexagone en cette mi-novembre. Chu pu capab’ d’entendre au bout du fil, la gorge serrée par l’émotion un « il fait que 13 à Lyon, tu te rends compte? L’hiver arrive vraiment tôt cette année » ou de lire dans un mail fébrile « On commence à franchement se geler à Paname » quand météo-média m’annonce dans le même temps que la Ville lumière ne cède qu’un seul petit degré à la capitale des Gaulles.

 

Méfie toi quand c’est pas cher pour aller au Canada

Ne t’inquiète pas cher lecteur, et toi non plus cher justicier masqué québécois, tout ça c’est pour de rire. Je ne déteste pas le Québec pour de vrai. J’ai seulement un problème avec les caprices de la température nord-est américaine.

Du coup, vous l’aurez compris, ça pèle sec du coté de chez Garou et pendant que le rocailleux chanteur se tape Lorie sous le soleil des Bahamas, chaque jour qui passe à Montréal me fait prendre conscience que Boubounette va sérieusement en chier quand elle va sortir de l’avion. Je songe à lui acheter une tenue bibendum estampillée du logo du Canadien du plus bel effet.

 

Et dire que Laurent (le père de Boubounette et accessoirement mon frère) se réjouissait d’avoir fait l’affaire du siècle en achetant des billets pour le Québec à cette période. Une fois qu’il aura pris place dans le cockpit désert, peut-être aura-t-il la révélation. Personne ne vient au Québec en décembre! Au contraire, la province se dépeuple aussi sûrement  Comme le dit l’un de mes collègues de boulot, « c’est la période des morts. » Charmant!

 

Afin de ne pas laisser le climat rugueux dicter sa loi, et surtout pour ne pas rester le cul vissé à la casba, j’ai entrepris de sortir notre réceptionniste délurée au musée des beaux-arts de Montréal, samedi dernier. Pour être plus précis, elle a décidé que je devais la traîner dans les galeries d’un musée, peu importe lequel. Devant son regard suppliant que n’aurait renié le chat botté de Shrek, j’ai eu la faiblesse de me plier à la demande. Et bien m’en a pris puisque je dois avouer que nos déambulations au milieu des croûtes des noms illustres de la peinture ont soudain pris un tour fort intéressant. Je dois préciser à ce stade de l’histoire qu’il s’agissait, pour celle qui me menace quotidiennement de plainte pour discrimination (appelons là pour respecter son anonymat « cépasskechuinoire? »), de sa première visite dans un musée! Et un dépucelage culturel c’est assez intéressant à vivre (C’est aussi bien stressant puisque après avoir fait le malin hors musée à balancer de la référence wikipédia, il faut assurer comme une bête devant Dali pour masquer ses faiblesses en histoire de l’art face aux étudiants en beaux arts de McGill venus justement se détendre les neurones cet après-midi ci).

 

Y’en a qui se retournent dans leur tombe

Imaginez plutôt, une jeune femme de 28 ans, bien dans sa vie, bien dans son corps (bien qu’extrêmement orgueilleuse), à la pointe de la mode, apprêtée de la tête aux pieds comme pour le bal des débs, à la suite du haut-alpin mal dégrossi que je n’ai cessé d’être depuis Grenoble, en train de s’extasier sur la moindre galerie d’art au rabais qui jouxte l’édifice du savoir. Première étape, lui expliquer que non, il ne s’agit pas du musée en tant que tel, que toute pièce qui renferme des tableaux n’en est pas nécessairement un.

Aux sempiternels « Et c’est qui celui-là de peintre? » répondent de plus en plus agacés « Mais bordel, je sais pas, c’est encore un de ces torches pinceaux québécois avec juste assez de talent pour exercer place du Tertre. Voudrais-tu bien la mettre en veilleuse jusqu’à ce qu’on arrive au musée? »

 

Mais le cœur de l’action se situe dans la salle des peintres modernes. Dans un petit 300m², les murs se parent des coups de pinceaux géniaux des plus grands noms du cubisme, de l’impressionnisme, du pointillisme… Cézanne le dispute à Monet qui lui-même fait face à Dali. Les visiteurs au garde à vous observent un silence religieux et prennent des poses inspirées afin de convaincre leurs comparses de toute la science esthétique qu’ils portent en eux. Seule une voix peu complexée se fait entendre et brise l’implicite règle muséale du « ferme ta gueule et contemple ».

« Bon alors, c’est qui lui?

-         Ben c’est une toile de Monet, le peintre à l’origine du mouvement impressionniste

-         Et ça représente quoi?

-         Les côtes normandes en France

-         C’est ben fade!

-         Mais non, c’est tout en nuances, c’est doux, c’est le but de la toile, laisser passer le ressenti de l’artiste.

-         Et lui, c’est qui?

-         Ah, lui c’est Cézanne, le peintre de ma région. Regarde comme c’est subtil, comme c’est beau, comme c’est épuré alors que dans le même temps on ressent toute l’intensité de la Provence. Il était le principal concurrent de Renoir aux beaux...

-         C’est laid!

-        

-         Bon, je vais m’asseoir en attendant que t’aie fini de t’émerveiller devant chaque tableau.

-         Putain, mais c’est pas un banc public, c’est un bronze de Rodin! Espèce d’inculte!

-         Ouhhh? C’est parc’que chuis noire? »

 

Le reste de la visite a été du même acabit, autant vous dire que j’étais bien content de quitter les lieux, même si je dois dire que tout cela a été bien rafraîchissant.

Sinon, c’est confirmé, j’ai obtenu mes vacances, saigné mon portefeuille, je pars me faire cramer l’épiderme sur le sable d’Acapulco du 20 décembre au 6 janvier!!

Les premiers flocons sont tomés sur Montréal, marquant l’implacable début de la migration canadienne vers les contrées du sud. En vertu d’une règle sociale, plus t’as de thune, plus tu descends, les moins riches se ramassent sur les côtes de Floride et les plus aisés à siroter une Caïpirinha au Brésil.

Sur la photo, c’est Pépé, mon ancien coloc mexicain avec la maillot de Nasri. Dans le mooonde l’Ohaimeux!!
Partager cet article
Repost0
1 novembre 2007 4 01 /11 /novembre /2007 03:11

Où l’on apprend que les Mongols ourdissent en sous-main un complot dans l’Hexagone, qu’une puce au caractère bien trempé s’en vient charmer le Québec du haut de ses deux ans et que bientôt Moul-Boul pourra tenir le crachoir à José Luis Zapatero.

 

Je vais déroger brièvement à la raison d’être de ce blog qui a pour but de vous tenir au courant de mes pérégrinations au goût de Poutine. Non pas qu’il ne se passe absolument rien au Québec (bien que le thermomètre soit passé sous la barre symbolique du zéro (absolu) ce week-end), mais plutôt que de gros changements sont en cours du coté de notre bon vieux continent.

Pour vous la faire rapide, il semble que l’esprit (et l’habitat) de Gengis Khan (à ne pas confondre avec Strauss-Kahn) se soit emparé de certains membres de ma famille.

Pagnol a dit pas mal de conneries et a pourri l’adolescence de tout jeune Français passé par la case école primaire avec les inénarrables « La gloire de mon père » (dans lequel le jeune Marcel en a une demie molle dans le caleçon à la vue de son père assassinant sans autre forme de procès deux bartavelles sur le plateau du Garlaban. Freud aurait certainement apprécié) et « Le château de ma mère », mais il faut reconnaître qu’il eût quelques éclairs de lucidité. Dont ces mots : Comme les enfants viennent trop tard pour faire l'éducation des parents, il faut respecter leurs incurables manies, et ne jamais les chagriner.

« Mais où veut-il en venir ? » vous entends-je hurler. « On veut des faits !! » Laissez moi donc vous resituer la dramaturgie de la geste Moulboulienne.

Mes parents se sont séparés voilà huit ans. Depuis ce temps, ma mère vit dans la résidence familiale qui se trouve être en instance de vente. L’une des questions qui anime le foyer, consiste à savoir où mère s’en allera une fois preneur trouvé ? La réponse m’est arrivée de manière détournée, presque en off ce week-end.

 

Gelons nous le cul pour la nature

 

L’esprit pétri de l’esthétique des pubs pour les yaourts Fjord, ma mère entend vivre désormais dans une Yourte. L’initiative est le juste prolongement de la volonté maternelle d’embrasser la cause écolo-altero-mondialiste et de tailler la bavette avec Dame Nature sur le réchauffement global. Le tout au sein d’un village « écologique », où entourée de ses « amis », elle apportera sa pierre au nécessaire changement de ce monde qui court à sa perte.

Ma mère sait-elle qu’à défaut de château, c’est une tente Maréchal en plus blanc et en plus ambiance steppe asiatique qui l’attend ? Un style de vie qui sied mal au confort douillet auxquels se sont habitués ses os vieillissants. Plus de chauffage autorégulé, d’eau chaude calculée au degré près. Sans parler de l’espace intérieur. C’est une véritable révolution qui l’attend au-delà de la lubie bobo. En a-t-elle bien conscience ?

Bref, c’est pas demain la veille que je vous inviterai en week-end à Marseille.

 

Boubounette’s gonna rock New York

 

Ce week-end, j’ai également été informé de la farouche volonté de mon grand frère et de mon père de venir squatter ma banquette clic-clac montréalaise. Et comme mon frère se fait vieux et perd de son bagou de bon goût, il n’a rien trouvé de mieux que de ramener dans ses bagages ma furie de nièce adorée. Deux ans, pas encore un mètre, un carafon en béton armé et des mains particulièrement mobiles et agiles, taillées pour dévaster un intérieur en moins de temps qu’il n’en faut à l’OM pour marquer contre son camp. C’est dire !

L’adorable bambin, mieux connue sous le nom de Boubounette va enchaîner une série de « premières fois ». Son premier voyage en avion, son premier vol transatlantique, son premier passeport, son premier décalage horaire, son premier cas de discrimination à la nationalité française à la frontière américaine, son premier contact avec Central Park, son premier -20, son premier choc culturel…

Dommage qu’elle soit trop jeune pour en conserver le moindre souvenir. Reste que j’ai hâte d’avoir un bout de Provence dans mon salon.

 

Babylone brûle

 

La otra noticia del dia es que yo aprendo el Espanol con una profesora chilanga en el YMCA de Montreal. La baroudite aigüe, doublée d’un « syndrome du voyageur impénitent » dont je vous parlais dans ma précédente note, m’a fait prendre conscience qu’après l’anglais, il était important de se farcir une autre langue étrangère dans le but de faciliter le traitement. J’ai pris la liberté d’éliminer le Chinois (trop chiant et trop concentré en terme de superficie mondiale) ainsi que l’Hindi et tous les autres dialectes baragouinés au pays des vaches sacrées. Ne restait plus que l’Espagnol dans l’ordre des langues les plus parlées dans le monde. Elle présente la particularité d’être facile d’apprentissage. Même pour un Français accroché à sa langue comme un Québécois à sa cabane à suc’. Mais il convient à ce stade du récit de vous conter mon premier contact avec le cours de Teresa Palma.

Je pense avoir mis la main sur un certain nombre de spécimens qui devraient fournir leur lot d’anecdote dans ces pages.

Je vous épargnerai le sentiment de retour en arrière quand il s’agit de remettre les fesses dans une salle de classe, d’autant plus quand celle-ci n’est pas peuplée des Kékettes. Concentrons nous plutôt sur la Dream Team qui compose cette assemblée hétéroclite.

Appliquant une règle séculaire et universelle de l’apprentissage scolaire, Teresa commence par les phrases d’usage afin que chacun puisse se présenter. Le premier à être désigné est un dentiste immigré issu du monde arabe. Teresa nous explique que l’apprentissage de l’espagnol devrait être plus aisé pour lui en raison de certaines proximités de prononciation entre les deux langues. Le bonhomme s’exécute, donne son nom, son prénom, son âge, puis, rien… Il bloque. Au moment de décliner son pays d’origine et sa nationalité plus aucun son ne sort de sa bouche. On voit qu’il lutte, mais quelque chose le tracasse. Finalement, Teresa s’enquiert de savoir s’il a bien compris les mots inscrits au feutre Véléda.

« Ben, c'est-à-dire, je comprends, oui, mais je ne sais pas comment répondre…

-         Ben là (ma prof chilienne est parfaitement intégrée à la société québécoise), on te demande juste de donner le nom du pays d’où tu viens et ta nationalité.

-         C’est un peu complexe…

-         Comment ça complexe ?

-         Je suis Palestinien, mais… je suis né  en Israël »

Comme dilemme identitaire, on pouvait difficilement faire pire. Par solidarité (et pour ne pas passer d’entrée pour un connard. Je dois laisser encore l’illusion agir), et parce qu’en tant que Marseillais de naissance ayant vécu à Paris, je peux imaginer ce qu’il vit (je préfère préciser que c’est une boutade), je me suis retenu de rire tellement le silence qui s’en est suivi était lourd de sens.

Sur les visages de tous, on pouvait lire un muet « mon pauvre vieux ! ».

Jusqu’à l’heure de cours, pas grand-chose d’autre à signaler, si ce n’est la présence d’un authentique gothique Québécois et d’une Béninoise rigolote dont la localisation du pays a donné du fil à retordre à Teresa.

 

Te gustas soplar nucas ?

 

Lors de la reprise, trois nouveaux membres se sont joint à notre groupe. Ils avaient commencé par se tromper de salle et on finalement été guidés dans les dédales du Y (prononcez « why » pour être « in ») vers le graal linguistique.

Parmi ces trois là se trouvent Alain, directeur marketing et homosexuel de 48 ans qui semble déjà me trouver à son goût. Les ravages que je cause dans la communauté se perpétuent au Québec semble-t-il. Les deux autres sont cadres dans… Dans quoi au fait ? Mais derrière l’assurance apparente que leur confère leur statut social, leur expérience et la détention de diplômes prestigieux, se révèle bien vite une incompétence criante à assimiler un nouveau langage.

Au détour d’un échange, Teresa entend nous apprendre le mot « Risa ». Ne voulant nous le traduire en français, elle désigne son rictus et nous demande avec insistance « Que significa risa ? ». Emportée par un enthousiasme proportionnel à sa bêtise, l’une des deux comparses répond sans réfléchir et à (très) haute voix « Ah ! Ok ! Moustache ! »

Le reste de l’assistance n’a pu s’empêcher de lâcher des rires sonores, devant une Teresa dépitée.

La scène aura au moins eu le mérite de détendre l’atmosphère un peu lourde qui caractérise depuis toujours les premiers jours d’école.

Ce soir c’est le deuxième cours, peut-être pourrais-je y puiser une certaine inspiration. Je vous tiens au courant.

Partager cet article
Repost0
24 octobre 2007 3 24 /10 /octobre /2007 01:39

Où l’on apprend que Moul Boul a retrouvé le mot de passe de l’administration de son blog, que la mort de certains n’intéresse absolument personne et que la cabane au Canada est un mythe pour Français en mal de grands espaces.

 

« Le silence est d’or » disait l’autre. À ce rythme, le mois et demi de mutisme forcené qui vient de s’écouler aurait du me rapporter un sacré pactole. Mais comme les proverbes n’engagent que ceux qui ont la candeur d’y croire, mes poches (pas celles que j’ai sous les yeux) restent trouées. Mais sous la pression de la foule en liesse, je repars au combat littéraire, mon clavier en bandoulière.

J’entamerai mes retrouvailles bloguesques en répondant à la question qui vous brûle les lèvres et vous écorche les dents depuis tant de temps : Non, je en suis pas le mystérieux amant de Cécilia Sarkozy à l’origine du fiasco ménager qu’est en train de vivre le président de 62% des Français. Mes fréquents déplacements à New York (charmante bourgade de 400 âmes, perdue au fin fond des Laurentides) ces derniers temps n’étaient pas motivés par les débordements d’affection transatlantique de celle qui refuse obstinément d’être la Première dame de France. Je laisse ça aux patrons de boîtes de com’ parisienne dont la carte d’abonnement chez Point Soleil, masque mal la crise de la quarantaine.

Alors me direz-vous, que s’est-il passé pendant tout ce temps là dans la vie si peu commune du Moul-Boul? Il a bien fallu que je me remette des morts successives de Jacques Martin (encore un qui s’est fait avoir par la Cecilia) et du Mime Marceau, mais aussi terribles furent ces nouvelles, elles ne permettent pas de tout expliquer.

Alors, je vais vous la faire en condensé.

Pendant le mois et demi qui vient de s’achever, Moul-Boul :

-         A profité de Paris comme un vulgaire touriste pour la première fois de sa vie.

-         A confirmé au prêtre, contre forte somme (amortissement du week-end susmentionné oblige) que l’amour d’une Blonde et d’un Ness est plus fort que quelques carreaux de céramique manquant sur les bords d’une baignoire.

-         A vécu de vannes et d’eau fraîche en compagnie de quatre Toulousains turbulents dans son micro-appartement. La police appelée sur les lieux pour démanteler un camp de manouches aura finalement donné gain de cause aux immigrants temporaires sous la menace d’une procédure pour discrimination fondée sur l’accent.

-         A apporté sa pierre à la lutte en faveur du réchauffement climatique en conduisant sur 1200 kilomètres un gros 4x4 de marque yankee de 250 chevaux aux prétentions très raisonnables (à peine 20 litres aux cent, que demande le peuple?). Le rêve américain est polluant, il faut s’y faire.

-         A pris part à une soirée de résistance brayonne (à savoir, des jeunes d’Edmundston au Nouveau Brunswick qui se serrent les coudes dans un environnement montréalais hostile) et n’attend que de remettre ça.

-         A rebouffé la grande pomme pour n’en laisser que le trognon (et en a profité pour se culturer un peu en allant voir comment ça donne en vrai les posters d’Andy Warhol)

-         A vérifié qu’en matière de méandres administratifs, le Québec n’a guère a envier à la France.

-         Fait face à des accusations de malhonnêteté de la part de son employeur persuadé qu’il a sciemment menti sur la nature de son visa.

-         A compris qu’en vertu d’un formulaire B-27 de reconnaissance des compétences à l’étranger récalcitrant et tous ses petits frères tout aussi peu conviviaux, il n’obtiendra pas dans les temps le renouvellement de son visa.

-         Pense déjà à l’après. Parce que quitte à se faire crisser dehors du Québec (à regrets, il faut bien le dire), autant ne pas rentrer à la maison. Le syndrome du Globe Trotter s’est emparé de moi et le diagnostic est sévère. Paraît que ça serait chronique. Les spécialistes affirment qu’une rémission est possible aux alentours de la trentaine (oh le vilain gros mot).

 

Bref, je me suis tenu occupé pendant tout ce temps. Mon clavier a apprécié cette trêve automnale et reprend du service avec un appétit qu’il a du mal à contenir. Stouf, j’espère que tu lis encore ces lignes. Les mois qui viennent, principalement décembre et janvier devraient amener leur lot de situations cocasses, dramatiques ou burlesques. Alors on décroche de la Star Ac’ et on se remet à lire le blog de Moul Boul!!

Une dernière chose avant de vous quitter. J’ai vécu mon premier été indien. Il faut savoir que :

-         Ici on appelle ça l’été des Indiens, bien le nombre d’Indiens ne varie pas particulièrement à ce moment de l’année.

-         C’est très surfait. Les arbres sont certes très beau et arborent des couleurs flamboyantes fidèles à celles reproduites sur papier glacé dans les pages de « Grand Rep’ », mais le tout dure l’espace d’un week-end!

Je confirme donc que le Québec ne connaît que deux saisons, l’hiver, facilement identifiable grâce à une recrudescence d’amputations des membres gelés et un vague mélange de printemps, été et automne au cours du quel chaque jour est une tombola.
Partager cet article
Repost0
24 juillet 2007 2 24 /07 /juillet /2007 15:25

Où l’on apprend que Moul Boul regrette certaines de ses paroles les plus cinglantes (pardonne moi Vale), que le space cake est à déconseiller la veille de son premier jour de taf et que si on continue sur la lancée, Stef et son cœur d’artichaut pourraient bien remporter leur pari au détriment de La France qui pourtant fait preuve d’un lobbying intense dans la section commentaires.

 

 

Pour ne rien vous cacher, la plume me démangeait grandement, mais j’ai du contenir mes ardeurs épistolaire pour profiter jusqu’au bout de la Valeria de mi corazon. Il est temps que je vous conte les derniers développements en matière d’échanges cul-turels franco-mexicain.

Rappelez-vous, je vous avais laissés sur une mauvaise note. Pas de nouvelles de Valeria, volatilisée, disparue. Des rumeurs de voyage à Toronto. Un immense sentiment de foutage de gueule dont l’inconfort commençait à être difficile à masquer et un corps en proie à un stress tel que l’estomac refuse la digestion de toute nourriture ingérée. Bref, la belle aventure du début prenait des allures de radeau de la Méduse.

Je vous avais donc quitté sans nouvelles de ma belle. À peine eus-je remis mon capuchon, la plume encore chaude, que je reçois un coup de fil d’un numéro inconnu au bataillon. À l’autre bout de la ligne, je reconnais les intonations de ma centraméricaine. Nous étions le lundi 9 juillet, c’était son anniversaire et mademoiselle m’expliquait sans un mot sur son attitude, qu’aujourd’hui elle voulait me voir. Cinq jours de silence radio et là, tout de suite elle veut me voir. Pour la première fois de ma vie, j’ai eu la désagréable impression d’être un jouet dans les mains d’une petite fille capricieuse. Ce qui ne pouvait qu’accroître mon courroux.

Je la rejoins finalement à la station Mont-Royal en compagnie de son amie Ana, très sympa au demeurant. Je bous intérieurement mais ne peux exploser en présence d’Ana. Alors je ronge mon frein (je sais ce que vous vous dites et oui, je suis en négociation pour l’adaptation de ma vie amoureuse en telenovelas espagnole qui sera bientôt reprise en access prime-time sur TF1) et (tous en chœur) je fais la gueule. En guise de joyeux anniversaire, nul doute qu’elle aurait souhaité autre chose. J’ai d’ailleurs reconnu plus tard que j’avais agi comme un trou du cul ce soir là.

En ce soir de « fête », Ana et Val n’ont qu’une seule idée en tête, saupoudrer leur insouciance et leur jeunesse d’un zeste de substance illicite et sujette à fou rire. Comme Val ne fume pas, les deux chafouines se tournent vers la cuisinière et envisagent la réalisation d’un space cake à l’ancienne. Une première pour moi et une expérience que je ne recommencerai pas de sitôt. Probablement que le contexte d’ingurgitation de la chose n’était pas étranger à l’effet ressenti.

Lorsque votre taux de colère atteint des sommets et que l’adrénaline s’est substituée au sang dans vos veines, les têtes de beuh (« j’te jure mon frère je te file pas de la luserne ») ont un effet bloquant, et plus encore quand la digestion commence. Bref, je suis fin défoncé quand vient l’heure des adieux et je me souviens vaguement que Valeria me fait la bise et que ma colère n’est pas redescendue d’un poil.

Je passe l’une des nuits les plus bizarres de mon existence. Mon matelas affichant clairement sa volonté farouche de réaliser les destin dont il avait toujours rêvé, celui d’être un raft lâché dans les eaux tumultueuses du Zambèze.

Puis il faut se lever pour honorer mon premier jour de travail à la Commission en tant que chargé des relations presse. Le sang bat violemment mes tempes, la tête me tue. Je jette un rapide coup d’œil au miroir pour évaluer l’étendue des dégâts. Le gars qui me dévisage a une gueule à faire peur à Freddy Kruger. C’est à peine si la glace ne se brise pas pour mettre fin à ses souffrances. Le constat est évident, la journée va être longue!

Et pour cause, difficile de masquer les deux pastèques qui ont pris la place de mes yeux. Mon boss m’accueille et je vois bien à son air préoccupé qu’il réprouve mon apparence matinale, mais il ne dit mot. Durant toute la matinée, il s’évertue à me décrire mes tâches et mes responsabilités. Ses lèvres bougent et sans ambiguïté un son en sort, mais mon esprit est en rideau et n’imprime rien. Je finis par quitter le monde de Mickey sur les coups de 14 heures. Heureusement, j’ai du me mettre immédiatement sur mon premier communiqué de presse. Et comme le veut la règle, il ne faut jamais merder la première tâche.

Du côté de Val, silence radio jusqu’au jeudi suivant. Je reçois un mail de la belle m’expliquant qu’elle veut me parler. Rendez-vous est pris le vendredi soir. Je suis dans de meilleures dispositions, ma colère est retombée et au final, je me réjouis de cette conversation. Qu’elle qu’en soit l’issue, je serai au moins fixé. Dès qu’elle me voit, Valeria me rappelle son intention de me parler. Je commence par boire une bière et fumer une clope avec Ana. Laquelle me dévisage et me balance en travers de la gueule avec tout son aplomb « quand est-ce que tu vas arrêter d’être stupide ». Elle m’a plutôt bien cerné la bougresse.

Finalement, je l’appelle et lui demande ce qu’elle voulait me dire. Nous prenons un peu de distance par rapport à nos comparses afin d’avoir un peu d’intimité. Elle n’est pas très à l’aise. Visiblement ce qu’elle s’apprête à déballer n’est pas évident pour elle. Elle me prend dans ses bras et me susurre

« C’est dur pour moi d’exprimer mes sentiments.

-         Essaye.

-         …Je sais que j’ai pas été cool avec toi ces derniers temps…mais c’est parce que je suis en train de tomber amoureuse et que je repars bientôt au Mexique et je ne veux pas de ça.

-         (très con) T’es en train de tomber amoureuse de qui? De moi?

-         (non, de René Lévesque connard) oui

-         (Feliz, feliz)… Je suis dans la même situation »

Du coup, nous avons vite retrouvé les baisers langoureux du début et j’ai passé une dernière semaine exceptionnelle. J’en ai profité pour m’excuser de mon attitude de connard le jour de son anniversaire (I’m still sorry Val, cause I’ve been an ass hole for your birthday). Je lui ai finalement offert un beau cadeau et tout est rentré dans l’ordre.

Son départ a été dur à gérer. Arrivé à l’aéroport, j’avais mon passeport dans une poche et ma carte de crédit dans l’autre. Une question est venue me tarauder pendant un moment. « As-tu besoin d’autre chose ? » J’étais à deux doigts de prendre mon billet…

Maintenant il va falloir attendre jusqu’en décembre. Le temps va être long. Si j’étais riche, j’irais bien passer un week end de l’autre coté du Rio Grande.

Partager cet article
Repost0
8 juillet 2007 7 08 /07 /juillet /2007 00:49

Où l’on apprend que les relations franco-mexicaines connaissent quelques incidents diplomatiques qu’il va falloir résoudre au plus tôt, que Moul Boul passe à l’ennemi et prolonge son séjour Montréalais et qu’il trouve des compensations à sa frustration amoureuse dans le foot, la musique et l’humour.

 

Que ce silence fut long. Comme le faisait remarquer Cyril, j’avais de bonnes raisons de maintenir un mutisme prolongé sur la toile. Ma raison, mon cœur et mes soirées étaient plutôt pas mal prises. Pourtant, il s’en est passé des choses depuis ce dernier post. Tout d’abord, contrairement au libellé quelque peu déprimant du chapô, je ne suis pas encore retourné à mon célibat, bien que ceci ne soit qu’une question de temps. Soit par nécessité puisque la belle Valeria s’en retourne dans son Mexique natal le 21 juillet prochain (deux jours après mon anniv’ pour ceux qui tenteraient de l’oublier), soit par anticipation, vu que les baisers langoureux du début ont laissé place à un vague effleurement des lèvres, qui confère à la bise sur la joue un statut bien plus intime. Je tiens donc à adresser ici mes plus sincères excuses à la gent féminine hexagonale, à laquelle j’avais conféré un peu rapidement le monopole de la complexité. Je reviens sur mes paroles, les femmes mexicaines sont également difficile à cerner. Pour vous la faire vite, après ce que l’on a pu considérer comme un état de grâce sentimental, est venue la question traditionnelle du « on fait quoi maintenant ? ». En gros, tu rentres au Mexique et moi je reste comme un con à Montréal, le problème c’est que tu me plais. Toi aussi tu me plais, il faut qu’on en parle, mais là c’est pas le moment (dans un bar qui diffusait du Rock à fond les ballons, je peux comprendre). Le problème est que nous n’avons jamais eu la suite de cette conversation à peine entamée. A défaut, il me faut composer désormais avec une distance de plus en plus grande qu’instaure mon canon mexicain. Et comme dans ce type de situation je panique, je bloque et à mon tour, je l’évite. Cercle vicieux inextricable isn’t it ?

Mesdames, si vous pouvez me donner quelques explications, je vous en saurai gré. Est-ce une situation normale ? J’en doute. Pouvez-vous éventuellement me donner un début d’analyse ? Avec vos hormones bizarres, il est difficile de vous suivre.

Passons maintenant au menu réjouissances, bien que celui-ci contienne un hic. Et le hic le voilà. Je reste au Québec au moins jusqu’en mars 2008, mais après, je le promet, je rentre. Cela implique donc de revivre ce que la Belle Province fait de pire : les températures négatives !!!

Mais me direz-vous « Pourquoi est-il assez fou pour accepter de se geler les fesses un hiver de plus loin de sa terre natale et de ses amis ? » Pour raisons professionnelles vous répondrai-je. Vous lisez désormais les lignes du nouveau chargé des relations presse de la Commission des droits de la personne du Québec.

Souvenez-vous, je n’avais plus eu de nouvelles du poste depuis le passage des tests écrits. J’ai appris que cet état de fait était le résultat combiné d’un processus de sélection particulièrement long et de l’absence de la directrice des communications qui, lorsqu’elle est revenue a accéléré les choses. Jeudi dernier, j’étais donc convoqué à 10 heures afin que mes compétences soient disséquées avec précision par un jury de trois personnes. Après une heure de discussions à base d’organisation de conférence de presse, de rédaction de communiqué, de politique québécoise et d’accommodements raisonnables, vient la sacro-sainte question

« Vous avez des questions ?

-         Juste une en réalité, quand puis-je m’attendre à recevoir une réponse de votre part ?

-         Très rapidement, nous souhaiterions vite boucler le recrutement. »

Sur ce, je salue mon jury et m’en retourne à mon sombre job au centre de réhabilitation. Sur les coups de 15 heures, mon téléphone retentit.

« Monsieur Moulet ?

-         Oui ? Qui le demande ?

-         C’est la CDPDJ, pour vous dire que nous vous attendons mardi matin à 9 heures.

-         …. Ca veut dire que j’ai le poste ?…

-         Non connard, on veut juste que tu vienne récupérer ton CV et qu’on entende plus parler de toi !

-         Oh merci, c’est génial ! »

Environ trois minutes après avoir raccroché, mon téléphone s’égosille à nouveau. Mon fan club local a été mis au courant et entend me faire partager sa joie. Marcelle, presque plus émue que moi m’apprend qu’elle a croisé la directrice des communications qui lui a dit, je cite : « il l’a la job le jeune. Je l’ai pris parce qu’il est intelligent et qu’il comprend vite ». Que d’honneurs !!

Je rentre chez moi le soir sur un petit nuage, non sans être passé par la case Cepsum pour évacuer le surplus de stress accumulé.

Pas de traces de Valeria, mais en revanche Vinh est là et entend fêter dignement l’événement. Nous voilà donc revenus du SAQ une bouteille de Moët et Chandon sous le bras, que nous nous empressons de vider à deux. L’ivresse du champagne est incomparable, surtout quand il est bon. Et celui-ci était exceptionnel.

Voilà donc le topo, je reste ici jusqu’à la fin de mon contrat, soit le 31 mars 2008. Un prolongement de trois mois. Mais c’est pour la bonne cause. Une telle expérience ne sera pas négligeable. Je vais tenter de faire des piges à coté, étant donné que je vais avoir quelques contacts avec les rédactions québécoises.

Je devrais également passer Noël au Mexique chez mon pote Mario qui s’en est retourné là bas.

Pour le reste, l’été montréalais, si l’on excepte des températures plus que fluctuantes est plutôt sympa. En ce moment se déroule le festival international de Jazz. Des scènes ont été disposées de partout dans la ville et Montréal vit au rythme de la batterie, du saxo et de la contrebasse. Un vrai délice.

Hier soir, Pépé, Vinh et moi avons assisté au concert de Oxmo Puccino, rappeur parisien d’origine malienne, accompagné d’un orchestre jazz : les Jazzbastards, le tout dans une ambiance gangster que n’aurait pas renié la prohibition aux Etats-Unis. Vraiment excellent.

Mais il y a aussi le foot à Montréal ! Le Canada accueille la Coupe du monde des moins de 20 ans (à laquelle la France ne prend pas part, laissant à l’Autriche le soin de représenter l’Europe. Qu’importe, je vais voir les trois prochains matches qu’accueille le stade olympique de Montréal. L’occasion de voir briller les vedettes de demain.

Je vous livre une dernière règle avant de prendre congé de ma plume, pour adoucir les peines de cœur, il ne faut pas rester inactif.
Partager cet article
Repost0
20 juin 2007 3 20 /06 /juin /2007 04:22

Où l’on apprend Moul Boul accroît l’influence française de l’autre coté du Rio Grande et vise le poste de diplomate à Mexico, que lors d’une négociation bilatérale, il s’est fait subtiliser la valise diplomatique et que les rumeurs d’homosexualité latente qui lui collaient à la peau en raison d’un absence criante de moitié féminine, vont pouvoir laisser place aux rumeurs de bisexualité, entre nous beaucoup plus tendance.

 

C’est donc officiel, je ne suis plus célibataire! Je vais même vous le réécrire une fois de plus afin que vous ne pensiez pas avoir fait une faute de lecture. Je ne suis plus célibataire! Et non, ce n’est pas un homme. Ne me demandez pas comment j’ai fait, je ne le sais pas moi-même. J’en entend déjà qui disent « de toute façon, c’te p’tite bite il a rien fait, c’est elle qui a du lui arracher la chemise pour qu’il comprenne que éventuellement il y aurait peut-être une possibilité pour qu’elle s’intéresse à lui. » (n’est-ce pas Nat et Aurelle, voire Blondasse?). Et là je dis grossière erreur. Ce soir là (jeudi dernier), je ne portais pas de chemise mais un polo bleu. Et la tradition au Mexique veut que le quart d’heure américain de nos boums de boutonneux, n’a pas droit de cité. En plus ces nazes ne connaissent même pas le slow. Ah, pour danser la Salsa, la Meringue et le Chachacha, y’a du monde, mais mettez leur un bal musette et ils sont perdus les buveurs de Tequila!!

Bref, tout ça pour dire que contrairement aux mœurs moulbouliennes habituelles, je me suis sorti les doigts du cul et ça a payé.

« Mais comment fait-il? » me direz-vous. La première étape a consisté à neutraliser la menace Fabrice qui avait lui aussi repéré la belle, le fameux soir de la rencontre (cf. note précédente), et dont les hormones sont dans un état d’affolement permanent. « Fab, pas touche à celle là, elle est pour moi. Laisse moi me planter et après tu pourras lui sauter dessus ». Déjà attiré par la perspective d’autres attributs féminin, Fab a passé son chemin, non sans me lancer cette sournoise mise en garde : « Ok, mais si tu te bouge pas le cul, je reprend le dossier ».

Action, réaction.

Je vous épargnerai les détails de ma laborieuse stratégie d’approche. Heureusement pour moi, Valéria avait déjà fait son choix. Venons en directement au fameux soir où sur un malentendu, c’est passé. C’était jeudi dernier dans une coquette résidence étudiante appartenant à mon proprio voyou (qui n’avait pas payé la facture d’électricité de notre appart depuis plus d’un an). Nous fêtions, dans la joie, l’allégresse, l’alcool et la Salsa, le départ de Jorge qui s’en rentrait dans son pays presque bilingue en Français mais avec un accent québécois à couper au couteau. Valéria était des nôtres. D’un simple regard circulaire de la pièce, il était aisé de comprendre qu’elle ne laissait pas de marbre l’assemblée masculine internationale présente. Il était urgent d’agir avant que l’Allemand avec son regard fourbe, le Suédois avec son sourire glacial ou le Vénézuélien avec son déhanché intriguant ne tentent une quelconque manœuvre. J’ai donc fait ce que tout Français de normale constitution aurait fait. J’ai fait courir la rumeur de leur homosexualité  et j’ai marqué mon territoire en ne lâchant pas d’une semelle les frontières du Mexique.

La stratégie s’avéra payante puisque le pays m’accueillit rapidement à bras ouvert, mais nulle question encore d’embrasser la terre ferme. Du moins, pas devant l’assemblée de soiffards passablement éméchés qui sentait bien que quelque chose se tramait. Les Mexicaines ont des principes.

Vers 23 heures voilà pas que mademoiselle commence à montrer des signes ostensibles préalable à un départ. « I have to go » me souffle-t-elle à l’oreille. Et moi de lui répondre « Do you want me to go with you ?» La réponse tombe comme un couperet : « Yes »…

Après une marche plus qu’approximative jusqu’à la station de métro la plus proche, en raison d’un penchant prononcé pour l’alcool non bridé, vient le moment des adieux. La suite, vous la connaissez. Ce fût doux, tendre et ma foi, j’étais sobre comme un Sarkozy (ah non, mauvais exemple) sur le chemin du retour.

Voilà donc comment tout a commencé.

A mon retour, Mario (mon voisin mexicain) m’attrape au passage et me demande si j’ai ramené Valeria. « Va falloir penser à l’embrasser » m’assène-t-il. En d’autres temps, j’aurais acquiescé penaudement. En d’autres temps… Cette fois, j’ai pu répondre d’un triomphal « c’est déjà fait ! »

Mais je vous sent un peu sur votre faim, vous voudriez savoir comment ça s’est confirmé bande de voyeurs! Certes, rien n’est acquis le premier soir, d’autant plus lorsque l’offensive a eu lieu sous l’effet de l’alcool.

Le lendemain, nous nous retrouvons donc à l’appartement. Épuisé par la chaleur qui s’est emparé du Québec, je dors comme une enclume sur le sofa. Après une heure de profond sommeil, je suis réveillé par un léger feulement sur le parquet. Elle est là debout dans le noir, dans une robe tout aussi sombre qui met en valeur ses formes. Je vous l’avoue, je ne sais toujours pas ce qui a poussé une nana aussi belle à sortir avec moi. Et là, ma foi, tout s’est enchaîné le plus naturellement du monde, sans questionnements.

Enfin, sans questionnements… si, un en réalité. La question de l’ethnocentrisme et des différences culturelles se pose avec insistance dans ce genre de cas. J’ai découvert un truc pas mal dans la culture mexicaine que je ne peux qu’encourager à adopter dans nos sociétés occidentales. Quand tu roules une grosse pelle à une Mexicaine ça n’implique pas que tu sors avec elle. Encore faut-il lui demander en bonne et due forme si elle veut officiellement devenir ta copine. CE qui vous en conviendrez, laisse une place énorme à l’irresponsabilité masculine et peux éviter des lendemains complexes.

J’ai pu également dégager de cette étude socio-amoureuse un constat, que dis-je une règle majeure. Les femmes mexicaines sont moins complexes que les françaises.

Néanmoins, puisqu’il en faut bien un, la vie de couple n’a pas que des avantages. Non, je ne suis pas en train de me plaindre de mon statut de néo-coupleux, mais cet état de fait peut conduire à de fâcheuses situations.

Ainsi, samedi soir dernier, nous décidons Vinh, Alexandra, Valeria et moi de nous rendre dans le club « La Boom ». Vous connaissez mon amour immodéré pour les boîtes de nuit, mais là, à vrai dire je m’en contrefout (je m’en contrecâlisse). Après avoir acquitté le tarif d’entrée qui m’a privé de mes derniers billets (en revanche les femmes mexicaines sont aussi vénales que les Françaises), et avoir opté pour l’une des cinq ambiances proposées par le complexe, je prend Valeria dans mes bras, bien décidé à lui prouver à quel point je la trouve à mon goût. Les mains et les lèvres ainsi prises, je sens une main se glisser dans la poche arrière de mon jean pour retirer le portefeuille y ayant trouvé refuge.

Vinh et Alexandra ayant pris pour habitude de brider nos ardeurs salivaires, je pense qu’il s’agit d’une énième stratégie pour détourner mon attention. Une fois l’affaire pliée, je relève la tête et demande à Vinh de me rendre sa prise. C’est au moment où je constate la déconfiture de sa mine (et non pas la mine de sa confiture, mdr) que je comprends que je viens réellement de me faire chourraver cinq dollars, pas même de quoi se payer un demi verre de coca, ainsi que tous mes papiers exception faite de mon passeport et de mon permis international.

Je sais ce que certains sont en train de penser. Bande de racistes!

Bref, la galère administrative commence. Mais bizarrement, je n’en ai cure.

Au fait, petit sondage rapide, si je pars vivre au Mexique, combien d’entre-vous viendront me rendre visite?           
Partager cet article
Repost0